📀 Skepta - Ignorance is Bliss (2019)
Après 15 ans d'expérience sur la scène grime anglaise, Skepta connaissait un succès mondial avec son classique Konichiwa. Alors comment rebondir quand on est déjà au sommet ?
La grime, genre souvent oublié des débats et qui a pourtant influencé le monde entier. Le mouvement créé à au début des années 2000 et aux racines jamaïquaines à toujours gardé une forte teneur underground avec un mélange de sonorités rap, garage et dance.
Des artistes comme Dizzee Rascal ou Wiley ont marqués le genre à ses débuts puis un certain Skepta a fait son apparition. D'abord DJ, il sort ensuite plusieurs albums à succès sous son label "Boy Better Know" avant d'exploser en 2016 avec son classique "Konichiwa".
L'album et le genre a d'ailleurs marqué la scène française. Orelsan avoue s'être inspiré des flows de Dizzee, Sneazzy a carrément repris le hit "Shutdown" et on retrouve les codes grime chez Kekra à ses débuts ou sur le "Esquimaux" de Nekfeu et Népal.
Konichiwa sort du petit public de la grime et vient choquer le monde entier. Soutenu par Drake et Kanye, album de grime le plus vendu de l'histoire, vainqueur du Mercury Prize, c'est le succès total pour ce "film des 3 dernières années de sa vie" et son énergie explosive.
L'artiste a évolué sur la scène internationale avec des apparitions sur le "More Life" de Drake ou le classique "Praise The Lord" avec A$AP Rocky. Mais aussi sur le plan personnel puisque l'artiste de maintenant 36 ans est devenu père d'une petite fille.
Alors comment revenir plus fort après un tel exploit ? Dès la 1ère écoute on sent que "Ignorance is Bliss" est beaucoup plus travaillé, moins brut et peut-être moins spontané. La production, les flows, les textes tout est millimétré et évolue au fil de l'écoute.
Ce qui frappe immédiatement c'est la production aussi rafraichissante qu'unique. Un travail colossal, que Skepta gère lui-même, où les rythmiques grime viennent se méler à des sonorités asiatiques sur "Redrum" ou à de la flute de pan sur "Same Old Story".
La prod la plus marquante se trouve probablement sur "No Sleep" qui incorpore la sonnerie de réveil de l'Iphone dans l'instrumentale. Alors que le sample de "Murder on the dancefloor" vient sublimer "Love Me Not" en featuring avec Cheb Rabi et B Live.
Skepta multiplie les flows nonchalants pour venir découper ses productions intenses. Livrant au passage son album le plus personnel, loin du discours de l'artiste devenu une star, il reste fidèle à lui-même mêlant conseils à la jeunesse et provocation de la concurrence.
Il le rappelle "They say Ignorance is Bliss but I think it's a shame". Skepta ne prends pas de pincettes et livre sa pensée la plus brute sur l'instru, s'opposant directement à l'expression "ignorance is bliss" indiquant qu'il vaut des fois mieux ne pas savoir certaines choses.
La DA autour de cartes thermiques est puissante. De la pochette colorée et ses multiples situations, à la carte en ligne évoluant en direct en fonction d'où étaient les auditeurs qui écoutaient l'album où la tracklist qui réagit à la chaleur quand vous la touchez !
Une chaleur qui se retrouve sur le double vinyle d'un des albums les plus aboutis du genre. Au-delà de la tracklist réagissant à la chaleur, le gatefold est magnifique et les vinyles sont superbement mixés et pressés pour une ambiance explosive dans votre salon.
Sur "Ignorance is Bliss", Skepta défend son titre sans difficulté, s'éloignant des hits de "Konichiwa" pour un album expérimental extrêmement bien exécuté. Une pierre de plus dans l'édifice d'un genre qui a du mal à séduire le grand public, mais qui a pourtant tant à offrir.
Rédacteur : Victor
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